L’IMPARDONNABLE PÉCHÉ DE NOS PÈRES
Déjà l’orage gronde au sein de Babylone.
Au Carrefour de l’inéluctable,
Au soir des mutations,
Le vent d’Apocalypse va souffler sur mon île...
‘’Ils sont venus, dit le Poète ;
Ils sont venus avec la Pioche,
Ils sont venus avec la Croix’’.
Ils ont couché mon peuple dans l’indicible nuit
Et labouré son sein de leurs mains criminelles.
L’Europe et l’Afrika, dans le lit Caraïbe,
Ont alors copulé, et sans ménagement,
Sous le regard envieux de l’Amérique naissant.
Produit dénaturé d’un viol à ciel ouvert,
J’ai souvent oublié de savoir qui j’étais
Pour quémander l’obole de ma propre pièce,
Et devenir du Lion misérable valet.
J’AI PEUR !
Du fond de mes entrailles
Je l’ai sentie monter cette peur dégoûtante
Qui coagule ma vie et ma force d’aimer.
Pour pouvoir subsister dans ma propre demeure
Et aimer simplement mon foyer et mes frères,
Je suis bien acculé au devoir de haïr.
Ils m’ont fermé ces paumes
Que j’ai toujours tendues ouvertes à l’amitié.
Naïf et bon enfant,
Mon cœur n’était pas fait pour ce dilemme étrange.
Je suis fatigué de mourir.
J’AI PEUR et je demande POURQUOI.
A force de penser,
J’ai l’esprit lézardé, détraqué au possible.
Depuis le commencement, ils m’ont déclaré la guerre, et ce, sans répit et sans rémission. Expéditions, Découverte, Conquêtes, Esclavage, Évangélisation, Colonisation, Décolonisation, Néocolonisation, Spoliation, Haïti, Dette de l’Indépendance, Invasions, Vols en plein jour de notre Réserve d’or, Occupation, Banque Mondiale, FMI… Extermination ! Tous les moyens sont bons, tous les coups sont permis.
Pourquoi tant de haine et de détermination dans l’indécence totale?
Nos Pères ont péché par excès de conscience, en dépit de leur piteux état.
L’être humain, à travers eux, a pris conscience de son essence. ‘’Vivre libre ou Mourir’’. Esclaves sans armes mais sans complexe, ils se sont mis debout pour affronter l’imposture et vaincre l’indécence. Par leur éclatante victoire sur l’Absurde, ils ont révélé la magnificence du divin et l’immense beauté de l’humain. Avec cette victoire, c’est l’effondrement inimaginable de tout un système qui a fait la gloire et l’opulence de l’Occident tout entier. Péché impardonnable et impardonné jusqu’à nos jours. En effet, le mal persiste, car il faut bénir le lion qui daigne dévorer.
Hélas, la race des ‘Commandeurs’, ces esclaves serviles, refuse de mourir. Indignes héritiers de 1804, ils servent aujourd’hui encore de relais et d’exécutants aux malfaisances de l’Empire.
JUSQUES À QUAND ?
GTG/ mai 2024